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Incendies Critique du Film

  • thementontimes
  • Feb 17, 2022
  • 3 min read

“Les yeux sont le miroir de l’âme” dit-on souvent. Et dans Incendies de Denis Villeneuve, les yeux se font le reflet d'âmes agitées, tourmentées, torturées mais aussi exhumées. Le regard possède une place éminente dans la compréhension et la contemplation du film, tant il est porteur de sens et miroir de la décadence psychologique des personnages. Selon moi, l’essentiel du film pourrait être résumé à travers l’analyse du regard. Le regard de l’enfant face caméra dans la séquence d’ouverture, grave et noirci, qui a tout à envier à la blanche candeur d’un regard enfantin, et qui vous scrute et se rapproche tant la caméra s’en approche, brisant le 4e mur et déroutant le spectateur dès les premières minutes. Ce 1er regard qui fait écho au dernier. Celui de l’adulte qui observe la tombe d’une mère qu’il n’aura connu qu’à travers son absence, son viol et sa mort. Mais le regard qu’il nous sera donné de voir le plus souvent et qui ponctuera le film est sans aucun doute celui de Nawel, la mère. Du regard vide et traumatisé d’une mère à qui l’on arrache l’enfant et tue le compagnon, au regard déterminé et brave d’une mère qui traverse un pays en guerre pour retrouver son fils, qui se transformera en un regard de terreur et de désolation qui succède à l’absurde boucherie du bus, et qui murera en un regard de rancoeur et de haine qui poussera au meurtre, faisant place à un regard de folie et d’agonie humaine dans la prison de “Kfar Ryat” avant de retourner à ce 1er regard glacial, emplit de vide et de traumatismes mais regard qui cette fois-ci sera conjugué au visage de la mort. Et par un montage parallèle, le regard de Nawal du “Passé” se superpose à celui de sa fille Jeanne au présent qui lui aussi se modifie et s’intensifie au rythme des révélations toujours plus obscures et tragiques.


Il conviendra donc de saluer le talent des acteurs qui ont su faire parler leur regard pour mieux nous porter dans l’histoire. Car si l’on nous donne souvent à voir le regard des personnages, ce regard, et donc le point de vue qui l’accompagne, est celui que nous adoptons également. Car lorsque l’on assiste à la scène du massacre du bus, avec une camionnette transpercée de balles et aspergée de sang et d’essence avant de se consumer dans des flammes aigres d’atrocité, notre regard ne peut que s’assombrir et notre coeur s’alourdir. Toutefois, il arrive que le film, à coup d'ellipses et de hors champ, nous épargne quelques images noires et “malséantes” telles celles du viol, mais en n’en laissant juste assez pour susciter effroi et horreur. On se fait spectateur d’une tragédie recque faite d’une mère, de jumeaux, d’une quête de sens, de violence, de meurtre, d’inceste, de catharsis, de coup de théâtre…. Certaines caractéristiques telles l’enfermement pendant 15 ans, la quête de sens dans un monde absurde, l’inceste entre parent et enfant annoncé en plot twist de fin semble faire écho au film sud Coréen “Old Boy” de Park Chan-Wook qui lui aussi laisse une marque indélébile de par la consternation qu’il provoque en nous.


Plus encore, ce film à travers les regards qu’il nous montre et tout ce qu’il force notre regard à voir, cherche peut être également à changer le regard que l’on porte sur notre réalité, sur le monde qui nous entoure. Car l’absurdité d’une guerre qui provoque massacre et destruction pour des raisons politiques et religieuses n’est pas quelque chose qui relève uniquement de la fiction mais également d’une réalité qui a existé, va exister ou continue d'exister . La référence faite au Moyen Orient (peut être particulièrement à la guerre civile au Liban qui oppose Chrétiens et musulmans) semble assez évidente sans pour autant être au centre des considérations faites par le film. Car ce que l’on retient d’abord, c’est que peu importe le camp, la guerre est ignoble. Si l’on nous montre tant de regards que l’on n’aimerait jamais voir, c’est peut être parce qu’il nous faut les voir pour nous rappeler de la chance que l’on a d’avoir notre regard.


- Salim Ouaritini

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